euf jours entiers furent nécessaires pour réaliser les vingt cinq boites. Deux lutins, qui avaient démarré la décoration d'une vingt-sixième durent être stoppés net à grands coups de trompette ! Les rennes fourbus de leurs voyages incessants dormaient auprès du feu. Le chat Kossocé vérifiait que toutes les petites surprises avaient bien été placées dans chaque boite. Machinalement, il les recompta, juste pour être sûr, avant de les fermer. Comme à chaque Noël, une légère tristesse l'envahissait en pensant que ces beaux objets ne resteraient là qu'un très court instant puis disparaitraient dans le traineau jusqu'à leurs destinataires. Il se dit qu'une oeuvre d'art était bien éphémère pour son créateur.

Dans son gros fauteuil à bascule, le Père Neômme aussi semblait songeur. Sa pipe fumait sans but, s'évaporant solitaire dans la grosse main.

« Tout ce qu'on crée s'en va très vite » dit le chat.

« Mmoui » grommela le bonhomme.

« Quelque chose ne va pas ? » s'enquit l'animal.

« Je me dis qu'il manque un petit quelque chose. »

« Mais il n'y a plus de place ! » miaula Kossocé.

« Quelque chose d'inédit mais d'ancien. »

« Je ne vois pas. » conclu le chat.

C'est alors qu'il vit dans les yeux du Père Neômme cet éclat caractéristique qu'il connaissait si bien. D'un bond étonnamment silencieux, le maitre des lieux s'expulsa de son fauteuil et disparu dans l'escalier qui menait à la cave. Un lutin, déguisé en papier de soie, poussa un « shhhhhhhhh » mécontent et se rendormit aussitôt. Quelques bruits sourds se firent entendre en bas ainsi que des couinements de portes, puis le silence.




texte & histoire © Bruno Cariou / images libres de droit